I –
L’ETAT DANGEREUX :
Si on
devait donner une définition simple, on pourrait dire que c’est la très grande
probabilité qu’un individu présente de commettre une infraction.
Mais
cette définition est beaucoup trop large, il faut approfondir avant de voir les
différentes formes que peut prendre cet état et comment on l’apprécie.
A – LA
NOTION D’ETAT DANGEREUX :
Cette
notion a été mise en lumière par Garofalo en deux étapes successives :
dans la première il a dégagé la notion de capacité criminelle puis dans la
seconde il a mis l’accent sur l’adaptation sociale.
1°)
le concept de capacité criminelle ou témibilité
Déjà contenu dans un article de Monsieur Garofalo publié
en 1878, ce concept a été précisé dans son ouvrage « la criminologie » en
1885.le terme de témébilité n’a pas d’équivalent français. Il désigne la
perversité constante et agissante du délinquant et la quantité de mal que l’on
peut redouter de sa part.
En d’autres termes il s’agit de sa capacité criminelle. On
comprend alors pourquoi ce terme a été traduit par ceux de redoutabilité ou de
dangerosité. M. Garofalo a trouvé que ce concept est trop théorique. Il va
chercher une notion plus dynamique en construisant un nouveau concept, celui
d’adaptabilité.
2°)
le concept d’adaptabilité :
Il s’agit ici de déterminer pour chaque délinquant
l’obstacle capable de l’éloigner du danger en fonction de sa perversité ou du
degré de sociabilité qui lui reste.
Il faut rechercher ici la possibilité d’adaptation
du délinquant, c’est-à-dire les conditions dans lesquelles on peut présumer
qu’il cessera d’être dangereux. Cette formule est plus souple que la précédente
qu’elle englobe nécessairement. Elle est orientée en outre dans un sens positif
et constructif. Cette optique d’adaptabilité dépasse le diagnostic et le
pronostic de l’état dangereux et envisage le traitement dans une perspective de
reclassement social. Ce passage d’une définition statique à une définition
dynamique de l’état dangereux s’explique par le fait qu’il ne s’agit pas d’une
notion juridique abstraite mais d’une réalité clinique qu’on va pouvoir
observer sous plusieurs formes.
B –
LES FORMES DE L’ETAT DANGEREUX :
1°)
l’état dangereux chronique au permanent :
Cet état
est défini comme une modalité psychologique et morale dont le caractère est
d’être antisocial. Le terme « état » exprime ici quelque chose de stable,
de permanent. Il existe un certain nombre de délinquants qui ont une
personnalité présentant cette sorte d’état dangereux, mais au sein de cette
catégorie on peut faire des sous distinctions de cet état dangereux :
-
Selon l’intensité de l’état dangereux entre les délinquants professionnels et
les récidivistes ordinaires
-
En fonction de l’orientation de l’état dangereux entre délinquants spécialistes
qui commettent toujours le même type d’infractions et les délinquants mixtes,
qui commettent des infractions de natures diverses.
-
En fonction du moment de l’état dangereux entre le délinquant précoce et les
autres.
Quelques
délinquants seulement présentent un état dangereux chronique ou permanent mais
tous les délinquants avant de passer à l’acte possède un état dangereux
imminent.
2°)
l’état dangereux imminent :
Ce sont les travaux de M. Étienne De Greff qui ont mis en
relief cette forme liée au passage à l’acte. Il s’agit d’un état de
danger avant le crime qui va exprimer l’étape décisive de la trajectoire du
crime (l’iter criminis) c’est-à-dire le moment de crise qui va précéder
immédiatement le passage à l’acte. Le terme est pris ici dans le sens
qu’on lui donne quand on vise un état de fièvre. La question qui se pose est de
savoir dans quelle mesure un état dangereux imminent revêt le caractère
transitoire d’une crise passagère ou au contraire s’inscrit dans la ligne d’un
état dangereux permanent.
C –
L’APPREHESION DE L’ETAT DANGEREUX :
Elle est
basée sur la recherche d’indices. Elle va prendre en considération :
-
les signes qui permettent de découvrir les facteurs de l’état dangereux (ce
sont les indices biopsychologiques et sociaux)
-
les indices qui caractérisent la manifestation de l’état dangereux (ce sont les
indices légaux)
1°)
les indices légaux :
Leur recherche est familière aux juristes puisqu’elle
repose sur la présomption d’une correspondance entre la gravité d’une
infraction et la dangerosité de son auteur. C’est ainsi que celui qui a commis
un délit peu grave sera considéré comme un individu peu dangereux et remis dans
le circuit social (exemple : mesures alternatives à l’emprisonnement). Celui
au contraire qui a commis une infraction d’envergure sera considéré comme
dangereux et soumis à une longue privation de liberté. Enfin celui qui a commis
une série de délits (récidiviste) est considéré comme irrémédiablement
dangereux et neutralisé par une mesure adaptée.
Ces indices vont nous renseigner sur les manifestations de
l’état dangereux mais pas sur ses facteurs qui peuvent être relevés par la
recherche de signes.
2°)
les indices biopsychologiques et sociaux :
Ce sont les indices personnels à chaque délinquant qui
vont permettre de découvrir les facteurs de l’action criminelle. Ces indices
sont recueillis au moyen de techniques diverses (exemple tests) et ici la
dangerosité doit être distinguée du fait criminel celui-ci n’étant que le
symptôme de la dangerosité. Il existe un état dangereux pré criminel, antérieur
au passage à l’acte et qui le plus souvent va survivre à ce dernier.
Aussi, on ne doit pas attendre pour intervenir que
l’individu soit passé à l’acte puisque les indices biopsychologiques et sociaux
vont permettre de prévoir l’événement. Or, dans les faits, l’état dangereux pré
criminel (qui est celui qui se manifeste avant une première infraction) peut
très difficilement être apprécié sauf peut-être dans quelques cas spéciaux tels
le vagabondage, l’alcoolisme, la toxicomanie. Mais même dans ces cas, on
reconnaît que la généralisation de la présomption de dangerosité est tout à
fait arbitraire. En définitive, ces indices ne peuvent revêtir une véritable
portée que par comparaison, confrontation, association aux indices légaux. Ce
concept d’état dangereux a donné lieu à de nombreuses critiques.
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